« L’essentiel est invisible pour les yeux, on ne voit bien qu’avec le cœur », dira bien plus tard le renard au Petit Prince.

Pourtant, Timothée le vieil aveugle sait cela depuis sa plus tendre enfance. Lui qui ne peut voir ni les collines, ni les troupeaux de moutons, ni les rues de la ville, ni les décorations des maisons, ni la couleur du lac, ni les reflets du soleil, il sait voir avec le cœur. Il sait si la personne en face de lui est joyeuse ou triste, si le chien du voisin a faim ou non, si le temps va être ensoleillé ou orageux. Il ne peut utiliser ses yeux, mais il sent avec le cœur.

 

Ce jour-là, il ressent étrangement que quelque chose de très exceptionnel va se produire. Il demande à son fils de lui donner son chapeau et de l’accompagner. Le garçon pose beaucoup de questions pour savoir pourquoi ils se mettent en route, où ils vont, qui ils vont voir… Son père ne répond rien d’autre que « Tu verras bientôt ! Tu verras bientôt ! »

Bien sûr, le petit garçon voit, mais il ne voit rien d’exceptionnel ce jour-là, des collines, des moutons, le bord du lac, les ramasseurs d’olives sur leurs grandes échelles…

Il est encore bien plus étonné lorsque son père s’arrête près d’une simple étable et s’assied sur une grosse pierre. Le garçon demande encore : « Qu’est-ce qu’on fait là ? »
Le vieil aveugle répond : « Tu verras bientôt !»

 

Le soir est là, le ciel est sombre, au-dessus d’eux brillent des milliers d’étoiles…